Artéfactualité, saison 2, episode 1.
0:02:00 Kim Thúy : Dans cet épisode d’Artéfactualité…
0:05:00 Kim Thúy : Le premier partisan à être intronisé au Temple de la renommée du basketball….
0:10:00 Kim Thúy : Le superpartisan des Raptors de Toronto : Nav Bhatia.
0:17:00 Kim Thúy : Je m’appelle Kim Thúy.
0:19:00 Kim Thúy : Sur ce balado du musée Canadien de l’histoire
0:22:00 Kim Thúy : Ensemble, nous allons explorer ce que les objets et les histoires du passé peuvent nous apprendre sur qui nous sommes aujourd’hui.
0:30:00 Kim Thúy : Qu’est-ce qui trouvera encore écho demain?
0:32:00 Kim Thúy : Comment conservera-t-on le souvenir des évènements qui se déroulent autour de nous?
0:39:00 Kim Thúy : Lorsque vous pensez à des objets de musée, vous imaginez surement quelque chose d’ancien, d’unique et de grande valeur.
0:48:00 Kim Thúy : Eh bien, ce que j’ai devant moi est une figurine à tête branlante.
0:53:00 Kim Thúy : Et vous pouvez l’acheter en ligne pour environ 30 dollars.
0:56:00 Kim Thúy : Oui, je veux bien essayer.
0:58:00 Kim Thúy : Oh, elle bouge. (Rire)
1:03:00 Sarah Barnes: Ce que nous voyons ici, c’est Nav, le superpartisan.
1:08:00 Kim Thúy : Voici Sarah Barnes, conservatrice des sports et des loisirs au Musée canadien de l’histoire.
1:14:00 Sarah Barnes: Il a le bras droit tendu. Il porte une cape, un ballon de basket dans la main gauche, un turban et un chandail rouge avec l’inscription « Super fan 95 ».
1:25:00 Kim Thúy : Il est devenu une poupée comme Ken et Barbie, il avait deux choix pour pouvoir dire « j’ai réussi! ». Maintenant je suis une figurine.
1:36:00 Sarah Barnes: (En riant) Un jour il sera une poupée Ken.
1:39:00 Sarah Barnes: On l’appellera KenNav. (Rire)
1:42:00 Kim Thúy : Les musées ont donc des objets ordinaires. Qu’on peut acheter n’importe où?
1:49:00 Sarah Barnes: Oui. En fait, nous avons beaucoup d’objets qui peuvent surprendre les gens. Parce que l’histoire n’est pas seulement constituée d’objets culturels prestigieux. Nous ne nous intéressons pas seulement à la vie de la noblesse et des figures de la royauté. Nous nous intéressons aussi aux histoires et aux expériences simples, personnelles et quotidiennes. Nous nous intéressons tout autant au spectacle. Nous sommes donc très enthousiastes à l’idée d’aborder le sport non seulement sous l’angle des athlètes et des vedettes du sport, mais aussi des personnes qui les soutiennent.
2:18:00 Kim Thúy : Sarah explique que les gens qui démontrent de la partisanerie, comme Nav, constituent une part importante du sport moderne.
2:23:00 Kim Thúy : Le Musée souhaite recueillir et préserver leurs expériences.
2:28:00 Sarah Barnes: Quand on pense aux objets de notre collection, on voit qu’on a des choses comme des sièges de gradins du Maple Leaf Gardens et des tourniquets de la billetterie. Nous avons des choses qui font vraiment partie de l’expérience des gens dans l’aréna. Une partie de ce qu’on essaie de faire, c’est de raconter des histoires plus intéressantes et plus approfondies sur le sport. Ça signifie qu’il faut se tourner vers les individus qui suivent le sport et peut-être se reposer la question : qui constituent la base partisane, et qui sont les personnes qui peuvent vraiment trouver un sentiment d’appartenance dans le sport?
3:01:00 Kim Thúy : Historiquement, comment les individus issus de groupes marginalisés ont-ils été représentés à titre de partisans sportifs au Canada?
3:08:00 Sarah Barnes: C’est une excellente question. En général, je pense que la communauté partisane n’a pas été beaucoup explorée.
3:14:00 Sarah Barnes: Mais en tant qu’historienne, je pense que ce qui est clair, c’est qu’en étudiant le passé, nous pouvons constater à quel point le sport représente un important pan de notre culture auquel les communautés marginalisées on eu du mal à avoir accès, à y être reconnues ou traitées équitablement. Et cela s’étend aux gens racialisés, aux communautés autochtones, aux femmes, aux filles.
3:38:00 Kim Thúy : Pourquoi pensez-vous que Nav a attiré l’attention, et gagné le cœur de tant de gens?
3:44:00 Sarah Barnes: Je pense que Nav représente un point de vue vraiment unique, parce que l’histoire du sport est souvent centrée sur les athlètes et les figures héroïques. Il s’agit donc d’un type différent de héros sportif.
3:56:00 Nav Bhatia: Oh, non, non, appelez-moi Superpartisan. Non, je ne suis pas un superhéros. Je ne le mérite pas.
4:02:00 Kim Thúy : Vous l’avez deviné, voici Nav.
4:05:00 Kim Thúy : Oh, je pense vraiment que cela va bien au-delà du sport. Vous avez tant fait pour la communauté et pour nous, en fait. Je pense donc vraiment que, pour moi, vous êtes un héros. Ou un surhomme, si vous préférez.
4:22:00 Nav Bhatia: Je vous remercie. J’espère être à la hauteur.
4:25:00 Kim Thúy : Navdeep Bhatia a fui l’Inde pendant les émeutes anti-sikhs de 1984.
4:31:00 Kim Thúy : Il est arrivé à Toronto avec un diplôme en ingénierie mécanique et a postulé à des centaines d’emplois, mais a eu du mal à trouver du travail.
4:40:00 Kim Thúy : Il a fini par décrocher un emploi chez un concessionnaire automobile, où des collègues ont fait des blagues racistes et ont ri de son turban.
4:49:00 Kim Thúy : Nav s’est donc concentré sur son travail : il a vendu 127 voitures en 90 jours.
4:57:00 Kim Thúy : Il est aujourd’hui propriétaire de cette concession, ainsi que de deux autres.
5:04:00 Kim Thúy : En 1995, lorsque les Raptors de Toronto ont rejoint la NBA, Nav a décidé d’acheter deux billets de saison.
5:12:00 Kim Thúy : Il a expliqué qu’il cherchait un passetemps et qu’il avait envie d’essayer le basketball.
5:17:00 Kim Thúy : Depuis, Nav a assisté à tous les matchs à domicile des Raptors, à l’exception d’un seul, pendant la pandémie de COVID-19.
5:25:00 Kim Thúy : Il a commencé à être reconnu pour son enthousiasme et son assiduité irréprochable.
5:32:00 Kim Thúy : En 1998, la direction des Raptors l’a surnommé le « super partisan » de l’équipe.
Et en 2021, Nav est devenu le premier partisan à être intronisé au Temple de la renommée de la NBA.
5:47:00 Kim Thúy : Quelle a été votre réaction lorsque vous avez appris que le Musée voulait acquérir votre figurine à tête branlante pour sa collection?
5:54:00 Nav Bhatia: Je n’en revenais pas. Parce que, je dois dire, beaucoup de choses surprenantes se sont déjà produites dans ma vie et c’en est une autre.
6:02:00 Kim Thúy : L’idée derrière l’acquisition de votre figurine à tête branlante est qu’elle remet en question le stéréotype du Canada en tant que nation de hockey. Qu’en pensez-vous?
6:18:00 Nav Bhatia: C’est incroyable. J’ai vécu avec cette idée pendant les 28 ou 29 dernières années, parce que tout tournait autour du hockey. Et tout le monde s’étonne parfois que je ne me sois pas tourné vers le hockey, qui était le sport numéro un à l’époque, et que je sois devenu accro au basketball et aux Raptors. Mais je crois, et ce n’est que ma conviction, parce que le hockey est lui aussi divertissant, que le basketball est le sport le plus divertissant de la planète.
6:40:00 Kim Thúy : C’est très rapide. Et oui, je suis plus ou moins d’accord avec toi.
6:44:00 Nav Bhatia: Et c’est très divertissant. Et étant immigrant moi-même, je trouve que de plus en plus de personnes immigrées aiment le basketball, parce que, lorsqu’on arrive dans ce beau pays, on n’a pas beaucoup de ressources financières. Et pour le basketball, on n’a pas besoin de grand-chose. Vous avez besoin d’un ballon de basket, d’un panier à 15 ou 20 $ et d’un parc, et vous pouvez commencer à jouer. Avec le hockey, vous devez dépenser beaucoup d’argent pour l’équipement.
7:07:00 Kim Thúy : Oui. Je viens du Vietnam, où le football est le sport national parce qu’il ne requiert pas beaucoup d’argent pour le pratiquer.
7:14:00 Nav Bhatia: Tout ce dont vous avez besoin, c’est d’un ballon de basket. Un ballon à 5 dollars, un ballon de football ou un ballon de soccer. Et ça y est! Tout ce dont vous avez besoin, c’est de deux bâtons, que vous pouvez planter dans l’herbe pour commencer à jouer au soccer.
7:26:00 Kim Thúy : Vous avez raison. Oh, est-ce que je peux vous demander si vous jouez au basketball?
7:32:00 Nav Bhatia: Je n’ai jamais réellement joué, juste un peu, ici et là, des matchs à l’occasion. Mais non, je n’ai jamais vraiment joué. Mais j’ai commencé à le regarder il y a environ 29 ans quand les Raptors sont venus à Toronto.
7:45:00 Nav Bhatia: J’adore le basketball, le regarder, interagir avec les athlètes qui le pratiquent, parler aux membres de la communauté partisane. Le basket m’a donné l’occasion de rassembler les gens par l’entremise de ce sport magnifique, de ma fondation, de mes camps de basket et de tout le reste. Je dois beaucoup au basketball.
8:07:00 Kim Thúy : On a l’impression que les communautés marginalisées n’ont pas été correctement représentées dans la communauté partisane du sport canadien. Qu’avez-vous remarqué?
8:16:00 Nav Bhatia: Je n’ai jamais pensé que notre communauté n’était pas représentée. J’aimais simplement le basketball. Et les gens ont trouvé ça surprenant. En fait, quand j’ai commencé à aller voir du basket dans les arénas, c’était dans le dôme, le SkyDome, là où se jouait le basket pendant les deux premières saisons. Et quand j’y allais, j’étais une des rares personnes d’origine sud-asiatique, indienne ou pakistanaise, qui assistaient au match. Il y avait à peine 15, 20 ou 30 personnes. Et j’étais seul à porter le turban, car ce n’était pas très courant. Mais quatre ans plus tard, Isaiah Thomas, notre directeur général et président des opérations de basketball, m’a donné le titre de Superpartisan. Et c’est à partir de là que tout a explosé. Tout le monde, dans notre communauté, a commencé à aimer le basket. Aujourd’hui, si vous assistez à un match de basket à Toronto, vous verrez au moins un millier de personnes de notre communauté, certaines portant des turbans, d’autres non. Mais notre communauté sud-asiatique compte environ un millier de personnes qui regardent et apprécient le match, et pas seulement chez nous. Ailleurs, vous verrez des gens portant des turbans dans les matchs de San Antonio, du Golden State, de Houston, de New York. Les gens en Amérique commencent à voir des membres des communautés sikhe, indoue et musulmane qui viennent assister aux matchs.
9:43:00 Kim Thúy : Le public est plus coloré et plus beau, vous ne trouvez pas?
9:47:00 Nav Bhatia: Et la NBA adore et encourage le phénomène. C’est la raison pour laquelle j’ai été le premier à organiser un spectacle pendant la mi-temps pour illustrer et montrer notre culture. Et maintenant, vous pouvez voir les 29 autres équipes tenir une nuit culturelle similaire, une nuit indienne, une nuit sud-asiatique, une nuit punjabie. Elles le font toutes. Mais c’est nous qui avons commencé. Nous avons commencé pendant la saison 1998-1999 et maintenant c’est devenu une tradition dans tous les arénas. Et la NBA adore ça, parce que ça lui donne une base partisane de plus en plus importante. Et les gens commencent à nous regarder en Inde aussi, où beaucoup se lèvent tôt pour regarder nos matchs, parce que quand il est 19 heures ici, il est environ 4 ou 5 heures là-bas… et les gens regardent le match.
10:37:00 Kim Thúy : Mais je pense qu’ils se connectent uniquement pour vous regarder.
10:42:00 Nav Bhatia: Beaucoup de gens de la communauté regardent les matchs. Mais pendant les éliminatoires, j’avais beaucoup d’interactions avec du monde de partout. De Malaisie, d’Inde, de partout où il y a des personnes d’origine indienne. Je recevais beaucoup de messages. Mais vous savez, ce sport devient populaire. Et je pense que, d’ici une dizaine d’années, le basket prendra le pas sur le hockey au Canada.
11:06:00 Kim Thúy : Nav, c’est très audacieux de votre part. C’en est presque politique.
11:09:00 Nav Bhatia: C’est vrai, mais regardez d’où on vient avec le basket. C’est la première fois en 75 ans qu’on remporte une médaille à la coupe du monde. Une médaille de bronze, c’est quand même une médaille.
11:20:00 Kim Thúy : Je vois que vous aimez beaucoup le basketball. Mais, en 1995, pourquoi avez-vous choisi ce sport au lieu de, je ne sais pas moi, devenir un superpartisan des Blue Jays, par exemple? Pourquoi le basketball?
11:33:00 Nav Bhatia: Je suis arrivé en 1984, et de 1984 à 1993, pendant huit ou neuf ans, je n’ai pas voulu faire de sport. Je n’avais aucun passetemps, parce que j’essayais de m’installer. Vous savez, en tant que personne immigrante, quand on arrive, la priorité est de s’installer et de trouver un toit. C’est pareil pour tout le monde. Que vous soyez du Viêt Nam, de la Chine, de l’Inde ou du Sri Lanka. La priorité, c’est de trouver un toit. Et c’est ce que j’ai fait. Et quand je me suis senti un peu plus à l’aise, en 1994 ou 1995, quand les Raptors sont arrivés, je me suis dit que je n’avais aucun loisir, que j’étais un type ennuyeux. Je ne faisais que trois choses : travailler, travailler et encore travailler. Alors je me suis dit que j’allais essayer le basket. J’ai pris un abonnement de saison en me disant que si je n’aimais pas ça, je n’aurais qu’à ne pas le renouveler. Mais je suis tombé amoureux dès le premier match. Et ça ne s’est jamais arrêté. Je n’ai jamais manqué un match. Je crois que je suis tombé amoureux du basket plus vite que de ma femme! Le reste appartient à l’histoire.
12:35:00 Kim Thúy : Tout à fait. Je voulais vous demander, en 1998, quand le directeur général des Raptors, monsieur Thomas, vous a demandé de venir au milieu du terrain pour recevoir le maillot de superpartisan, vous avait-il déjà appelé auparavant? Avez-vous été surpris?
12:51:00 Nav Bhatia: J’ai été très surpris que ça se fasse.
12:54:00 Kim Thúy : Mais on vous l’avait dit?
12:56:00 Nav Bhatia: Non. Quand je suis arrivé au match, on m’a juste dit de rester à ma place pendant la pause. C’est ce que je fais d’habitude. Je suis collé à mon siège quand je suis au match, je ne vais nulle part. Et puis, on m’a annoncé et voilà, on a changé ma vie en m’offrant ce chandail.
13:10:00 Kim Thúy : De quelle manière?
13:12:00 Nav Bhatia: Eh bien, regardez ça. Je suis devenu le Superpartisan. Ensuite, j’ai commencé à faire d’autres choses dans la communauté en tant que Superpartisan. J’ai commencé à aider des enfants à venir aux matchs. Quand j’ai commencé les spectacles de la mi-temps avec la culture sud-asiatique, j’ai acheté 3 000 billets pour pouvoir emmener au match des enfants venant de milieux défavorisés, des enfants qui n’avaient pas cette chance, des enfants de confession indoue, sikhe, musulmane ou chrétienne, des enfants vivant avec une mère monoparentale. J’ai pris l’habitude d’inviter des enfants parce que j’ai connu des difficultés dans ma vie, notamment des gens qui me traitaient de tous les noms, ce genre de choses. Lorsque j’ai participé aux spectacles en tant qu’immigré, j’arrivais ici et je me sentais à l’aise. Alors je me suis dit que j’allais acheter des billets et faire venir des gens de toute la communauté pour que les jeunes de demain ne subissent pas la discrimination que j’ai subie.
14:02:00 Kim Thúy : Vous pensez donc qu’en allant voir les matchs des Raptors, l’équipe gagnera en confiance?
14:08:00 Nav Bhatia: Oui. Parce que, lorsque vous avez près de vous des enfants de confession musulmane, indoue ou chrétienne, de la communauté noire ou autre, d’origine vietnamienne ou chinoise, de 7, 8, 9 ou 10 ans… Tout cela a bien peu d’importance pour les enfants. Tout ce qui leur importe, c’est d’encourager leur équipe à gagner. Et c’est ce que les enfants font. Et c’est ce qui est intégré. Parce que les enfants ne voient pas qui porte un turban, un hijab ou autre chose. Tout le monde encourage son équipe à gagner. Et je pense que cela a très bien fonctionné. C’est pourquoi à Toronto, lors des matchs des Raptors, nous avons un arc-en-ciel. Nous sommes les Nations Unies. Parce que nous avons ouvert les portes pour que tout le monde soit le bienvenu et profite du moment. Et je crois que c’est la raison pour laquelle le Canada est plus diversifié que tout autre endroit. Je ne dirai pas que tout est parfait, mais nous avons parcouru un long chemin et il nous reste encore beaucoup à faire.
15:02:00 Kim Thúy : Oui, je suis certaine que cela a contribué à l’harmonie. Parce que je pense que toute personne qui est partisane, quand elle assiste aux matchs, n’a qu’un seul amour et c’est celui pour les Raptors, n’est-ce pas?
15:12:00 Nav Bhatia: Tout à fait. C’est leur seul amour. Et la religion ne veut plus rien dire. Vous savez, je crois sincèrement qu’à 99,99 %, nous sommes tous pareils à l’intérieur.
Je pense que si tout le monde donne une chance à l’ouverture d’esprit, à l’ouverture de cœur, un jour nous aurons une très belle société, avec un amour universel.
15:32:00 Kim Thúy : Oui. Je considère que le Canada, notre pays, est déjà très bien. Il y a encore beaucoup à faire, bien sûr, mais…
15:39:00 Nav Bhatia: Si je dis que nous venons de loin, c’est parce que quand je vais chez Tim Hortons pour acheter mon café, il y a des gens d’origines différentes qui font des égoportraits avec moi, qui me serrent dans leurs bras.
15:49:00 Nav Bhatia: C’est très différent de ce qui s’est passé quand j’ai commencé à travailler comme vendeur de voitures en 1984, où il y avait neuf ou dix autres personnes de type caucasien qui s’occupaient aussi de ventes. Quand je suis entré, tout le monde s’est moqué de moi. On a commencé à me traiter de tous les noms, à m’appeler « paki », et moi, à l’époque, je ne savais même pas ce que voulait dire « paki » et si c’était un bon ou un mauvais mot. Je leur ai simplement dit que je venais d’Inde, que je n’étais pas Pakistanais. Je me suis dit qu’on me confondait avec un Pakistanais. On m’a appelé comme ça. On disait que je portais une couche, que j’étais le type au tapis volant. On m’a traité de différentes choses. Et cette époque a été ma pire période au Canada. J’ai prié et j’ai dit : « Donnez-moi la force de survivre dans ce genre de société. Si je veux survivre, je dois faire mieux que bien. » Et c’est ce que j’ai fait. Je ne me suis disputé avec personne. Je me suis contenté de faire ce que j’avais à faire. J’ai vendu 127 voitures en trois mois et tous ces gens qui me traitaient de « paki » ou qui disaient que je portais des couches ont changé leur façon de se comporter avec moi et sont même devenus des camarades. Je les aidais à conclure des ventes. L’époque que nous vivons est donc bien différente de celle que j’ai connue.
17:05:00 Kim Thúy : Heureusement, les choses ont changé et les gens acceptent mieux les différences chez les autres.
17:11:00 Nav Bhatia: Comme je l’ai dit, au fond de nous, nous sommes pareils, nous formons un tout. Je pense que le racisme est moins présent aujourd’hui. Mais, je le répète, nous avons encore du travail à faire et nous devrions continuer à le faire pour rendre ce pays meilleur qu’il ne l’est aujourd’hui. J’appelle ça le paradis maintenant. Pour qu’il le reste, il faut que nous soyons tout le monde ensemble. Pas seulement moi ou vous. Chaque individu au Canada doit y travailler et se dire que nous avons de la chance d’être au Canada, et nous devons faire en sorte de toujours l’améliorer. Nous devons jouer en équipe et laisser l’endroit meilleur qu’il ne l’était avant nous. C’est ce que j’essaie de faire. Et j’aimerais que tout le monde le fasse.
17:59:00 Kim Thúy : Oh, une dernière question, je voulais vous demander si votre nom avait une signification, parce qu’en vietnamien, les noms ont toujours une signification.
18:06:00 Nav Bhatia: Bien sûr, mon nom complet est Navdeep. N. A. V. D. E. E. P. Et Navdeep veut dire « nouvelle lumière ».
18:12:00 Kim Thúy : Oh, vous nous avez donc apporté une nouvelle lumière, à tout le monde. Merci beaucoup.
18:19:00 Kim Thúy : Une nouvelle lumière. Quelque chose que Nav a définitivement apporté au basketball.
18:25:00 Kim Thúy : Mais, en quoi l’histoire de Nav et sa figurine à tête branlante aident-elles le Musée à retracer l’histoire du sport au Canada?
18:32:00 Kim Thúy : Et pourquoi est-il important de parler des communautés partisanes dans ce pays?
18:37:00 Kim Thúy : Sarah Barnes, conservatrice du Musée.
18:40:00 Sarah Barnes: Nous devons parler des communautés partisanes parce qu’elles font partie intégrante de l’expérience sportive moderne. Nous pensons qu’elles sont au cœur de toutes les histoires. Qu’elles font partie de l’excitation et du spectacle qu’est le sport. En observant les personnes qui encouragent le sport, qui se sentent liées aux athlètes, aux organisations et aux équipes, nous avons un aperçu de comment les gens s’impliquent dans le sport. Nous commençons à voir comment les gens s’intègrent dans la communauté. Les gens commencent à vivre le sport d’une manière vraiment profonde et à faire partie de quelque chose qui les dépasse.
19:10:00 Kim Thúy : Comment décide-t-on de l’objet à posséder? Par exemple, la figurine à tête branlante.
19:16:00 Sarah Barnes: En général, les figurines à tête branlantes sont des athlètes emblématiques, comme Wayne Gretzky, ou même des mascottes. Nous avons différentes mascottes qui ont été recréées en figurine à tête branlante. C’est vraiment unique d’avoir un partisan en figurine.
19:29:00 Kim Thúy : Oui, il est unique pour cette raison mais aussi pour la vie qu’il s’est faite ici au Canada.
19:36:00 Sarah Barnes: Son histoire nous fascine parce qu’il s’agit d’une figure publique. Cela nous permet de réfléchir à des dynamiques culturelles encore plus importantes au Canada.
19:45:00 Sarah Barnes: Je pense qu’il a exprimé ce que beaucoup de gens ressentent dans les gradins. C’est un passionné. Un partisan enthousiaste. Il suit en quelque sorte les hauts et les bas du sport, parce que, ce qui attire les gens dans le sport, ce sont les drames, les belles histoires, l’excitation. C’est tout ce qu’on retrouve dans un match.
20:08:00 Kim Thúy : Merci à la conservatrice Sarah Barnes d’avoir raconté comment la figurine à tête branlante de Nav s’est retrouvée au Musée canadien de l’histoire.
20:18:00 Kim Thúy : J’ai également apprécié ma conversation avec Nav Bhatia – le superpartisan des Raptors.
20:23:00 Kim Thúy : Merci d’avoir écouté Artéfactualité, une série de balados du Musée canadien de l’histoire. Je suis Kim Thúy.
20:31:00 Kim Thúy : Artéfactualité est produit par Antica Productions.
20:35:00 Kim Thúy : Ann Lang est notre productrice.
20:37:00 Kim Thúy : Soobin Kim est recherchiste.
20:40:00 Kim Thúy : Laura Regher et Stuart Coxe sont chefs de production chez Antica.
20:45:00 Kim Thúy : Le mixage et la conception sonore sont assurés par Alain Derbez.
20:49:00 Kim Thúy : Jenny Ellison, Robyn Jeffrey et Steve McCullough du Musée canadien de l’histoire sont les chefs de production de cette série de balados.
20:59:00 Kim Thúy : Visitez « musée de l’histoire point ca » pour découvrir les autres histoires, articles et expositions du Musée.
21:05:00 Kim Thúy : Pour plus d’informations sur l’histoire de Nav et de sa figurine à tête branlante, consultez les liens dans les notes du balado.
Version française par Power of Babel
Navdeep Bahtia est interprété par Cédrik Boyer
Sarah Barnes est interprété par Geneviève Dempsey
Directeur de plateau Olivier Couture
Traduction et adaptation par Caroll Cafardy
Ingénieur de son Olivier Couture
Mixage français par David Moreau
La chef de projet est Chantale Renée
Supervision par Eric Geringas