La population aide à repérer des sites archéologiques menacés

Matthew Betts

L’un des principaux aspects du travail des archéologues est de repérer des sites archéologiques. Pour ce faire, ils disposent de nombreuses techniques : ils peuvent effectuer des recherches poussées sur le terrain, consulter des documents historiques, faire appel aux histoires orales et aux connaissances traditionnelles autochtones ou utiliser la modélisation informatique, la télédétection, la photographie aérienne ou l’imagerie satellitaire. Toutefois, une source d’information, souvent négligée, provient du savoir issu des communautés locales qui habitent le territoire étudié et qui ont rencontré des sites archéologiques à proximité de leurs maisons.

Un nouveau projet du Musée canadien de l’histoire consiste à chercher des sites sur la côte sud de la Nouvelle-Écosse, une région où l’érosion côtière causée par l’élévation du niveau de la mer et par le changement climatique constitue une grande menace pour les sites archéologiques. Le processus d’érosion est tellement important que plusieurs sites découverts il y a à peine quelques décennies ont déjà été complètement détruits.

Le nouveau projet vise à repérer et à fouiller les sites restants avant qu’ils ne soient, littéralement, emportés par la mer. Il est réalisé en étroite collaboration avec la Première Nation d’Acadia, dont l’histoire est la plus menacée par cette érosion.

Le projet archéologique COASTAL* a été lancé dans les dernières semaines du mois d’août 2017. Notre objectif était de visiter et d’évaluer des sites connus, puis d’en trouver de nouveaux. Ce type de recherche demande énormément de temps. Or, compte tenu du rythme de l’érosion côtière, plus le temps passe, plus la quantité de données perdues est importante. Nous avons donc décidé de solliciter l’aide de la population avant que les sites ne soient complètement détruits.

Des archéologues examinent des objets

Des archéologues examinent et identifient des objets apportés par le public lors de la journée « Creusons la question : présentation et apprentissage archéologiques ». Musée canadien de l’histoire

Le 22 août, nous avons tenu une activité unique au Harrison Lewis Coastal Discovery Centre, qui est situé au cœur de notre territoire de recherche. Le nom de l’activité était « Creusons la question : présentation et apprentissage archéologiques ». Nous avions invité les habitants de la côte sud possédant un artefact ou un « trésor » ancien à se présenter au centre avec leur objet. En collaboration avec le Nova Scotia Museum, nous leur avions proposé d’examiner leurs objets afin d’en déterminer les usages et l’âge, cela en échange de renseignements sur le lieu et le contexte de la découverte.

La participation a dépassé toutes nos attentes. Malgré la distance, près de 40 personnes sont venues montrer plus d’une dizaine de collections. Elles avaient soigneusement emballé les artefacts dans divers contenants, allant du coffre de pêche au Tupperware. Une personne avait même disposé ses pièces préservées sous le plateau vitré d’une table basse.

L’activité a donné des résultats incroyables! Les participants nous ont apporté des pointes en pierre et des haches ayant plus de 3500 ans. Nous avons aussi examiné une imposante collection formée de centaines de fragments de céramique datant du milieu du xixe siècle. Une personne a apporté des objets qu’elle avait trouvés et qui dataient de périodes débutant il y a 4 000 ans et s’étendant jusqu’à l’époque de l’arrivée des Européens.

Finalement, les participants nous ont révélé l’existence d’environ 10 sites qui n’avait jamais été répertoriée par les archéologues, lesquels feront l’objet de fouilles au cours des prochaines saisons.

Artefacts apportés par le public

Quelques-unes des artefacts apportés au cours de la journée « Creusons la question : présentation et apprentissage archéologiques ». Musée canadien de l’histoire

Certains participants ont apporté des objets qui se sont avérés être de simples pierres usées. Cependant, les renseignements qu’ils nous ont fournis étaient tout de même précieux, car de connaître les endroits où il est inutile d’entreprendre des fouilles est tout aussi important que de savoir où porter notre attention.

Bien que notre objectif d’en apprendre davantage sur de nouveaux sites ait été atteint, nous sommes également parvenus à un autre but : celui de sensibiliser les communautés. Il est important, pour ceux qui s’intéressent à l’histoire de leur région, d’en apprendre davantage sur des objets qu’ils ont découverts il y a parfois plusieurs décennies. Nous avons profité de l’activité pour expliquer aux participants ce qu’ils devaient faire s’ils découvraient d’autres artefacts.

Ce type d’initiative participative constitue un volet important de l’archéologie : il n’existe pas de meilleurs gardiens du patrimoine archéologique que les personnes vivant sur les terres où il est enseveli.

Érosion côtière

Un exemple d’érosion côtière qui menace des sites archéologiques sur la côte sud de la Nouvelle-Écosse. Musée canadien de l’histoire

Que dois-je faire si je trouve un artefact?

Si vous découvrez un artefact, évitez de fouiller davantage ou de « creuser » pour en trouver d’autres, car vous risquez d’endommager le site. Signalez votre découverte à l’administration provinciale. Pour obtenir des renseignements sur le Special Places Protection Act et des coordonnées, veuillez visiter le site Web de l’Office of Special Places de la Nouvelle-Écosse.

*COASTAL : Community Observation, Assessment and Salvage of Threatened Archaeological Legacy (Observation par la collectivité, évaluation et sauvetage du patrimoine archéologique menacé).