Le Canada sur le vif

Olivier Côté

Comment raconter l’histoire du Canada à travers ses photos marquantes et celles qui sont moins connues? C’est là le cœur de mes préoccupations dans l’élaboration de l’exposition Le Canada sur le vif, que le Musée canadien de l’histoire réalise conjointement avec la Société Histoire Canada. À titre de conservateur, je suis responsable à la fois de la sélection des objets présentés – ici, pour l’essentiel, des photographies – et du contenu, soit des grandes thématiques de l’exposition et des textes qui accompagneront ces photos.

Le concept de base de cette exposition : adapter deux livres de photos, publiés en 2009 et en 2011 chez HarperCollins (100 Photos That Changed Canada et 100 Days That Changed Canada), pour en faire une exposition inspirante. Le défi : choisir les meilleures photos, qui sont associées à des textes d’auteurs reconnus, pour relater l’histoire du Canada. Mais sur quelle base choisir ces photos? Les considérations esthétiques doivent-elles primer sur les considérations historiques? Comment sortir de l’arbitraire?

Les Torontois envahissent la rue Bay le jour de la Victoire John H. Boyd, Toronto, 8 mai 1945. Archives de la Ville de Toronto, fonds 1266, article 96241

Les Torontois envahissent la rue Bay le jour de la Victoire
John H. Boyd, Toronto, 8 mai 1945. Archives de la Ville de Toronto, fonds 1266, article 96241

Pour résoudre ce problème, j’ai élaboré une grille de sélection conjointement avec Mark Reid, éditeur à la revue Canada’s History. Chacune des photos a été évaluée en fonction de la réaction émotionnelle qu’elle provoque, de sa valeur esthétique et de son rapport à l’histoire régionale et nationale. Mais nous ne souhaitions pas présenter aux visiteurs des photos qu’ils avaient vues des milliers de fois déjà. L’aspect unique et nouveau de celles-ci faisait aussi partie des critères de sélection, tout comme le fait qu’elles devaient être représentatives des facettes géographiques, ethnoculturelles et sociales de l’histoire canadienne, tout en présentant des hommes et des femmes remarquables du pays. Autant dire que l’opération équivalait presque à percer les mystères de la quadrature du cercle!

C’est un véritable jeu d’équilibriste que de vouloir représenter une multiplicité d’aspects avec un nombre limité de photos. Concrètement, cela signifie, par exemple, que certaines photos n’avaient pas l’éclat requis pour être sélectionnées, bien qu’elles évoquent un événement d’importance. Ou encore que retirer une photo pour la remplacer par une autre compromettait fortement l’équilibre géographique de l’exposition.

Donovan Bailey remporte l’or à la course de 100 mètres pour hommes aux Jeux olympiques de 1996 Doug Mills, Atlanta (Géorgie), 27 juillet 1996. Associated Press et La Presse canadienne, 96072701569

Donovan Bailey remporte l’or à la course de 100 mètres pour hommes aux Jeux olympiques de 1996
Doug Mills, Atlanta (Géorgie), 27 juillet 1996. Associated Press et La Presse canadienne, 96072701569

Un autre grand défi est celui de réduire des textes écrits par des auteurs de renom, qui font parfois 800 mots, en des textes intelligibles et intéressants de 125 mots… tout en conservant le style très personnel des auteurs. Le calculateur de mots ne m’aura jamais autant servi!

Malgré tout, j’ai la ferme conviction que l’exposition plaira à une variété de visiteurs. Le Canada sur le vif offrira un portrait impressionniste, et rarement banal, des moments heureux et dramatiques de notre histoire. Des auteurs d’ici feront découvrir aux Canadiens et Canadiennes, tantôt sur le ton de la confidence, tantôt de manière poignante, la vie de personnes célèbres et moins célèbres qui ont bâti le Canada.

La féministe Jackie Henderson à une manifestation Reg Innell, Nathan Phillips Square (Toronto), 26 août 1970. Reg Innell et Toronto Star, par Getty Images, 538953072.

La féministe Jackie Henderson à une manifestation
Reg Innell, Nathan Phillips Square (Toronto), 26 août 1970. Reg Innell et Toronto Star, par Getty Images, 538953072.

L’exposition sera présentée sur l’Esplanade du Musée canadien de l’histoire du 17 mai au 2 octobre 2017, pour ensuite faire le tour du Canada. Déjà, certaines institutions ont manifesté leur intérêt en Colombie-Britannique, en Alberta, au Manitoba, en Ontario et en Nouvelle-Écosse.