Le trajet du Dodge Fargo ou l’art de négocier les virages

John Staunton

Dans mon dernier billet, le 20 mars, j’ai décrit comment nous avions réussi à sortir un immense canot d’écorce de bouleau de l’aire d’exposition consacrée à la traite des fourrures dans la salle du Canada. Laissez-moi vous décrire aujourd’hui tout le processus de réflexion et les efforts déployés pour déplacer une camionnette de trois quarts de tonne, un Dodge Fargo de la fin des années 1930.

Dès que nous avons commencé à planifier ce déplacement, nous avons repéré le trajet le plus logique et le plus direct entre l’aire d’exposition et le monte-charge. Ce n’était pas le même que celui, sinueux, proposé pour l’itinéraire des visiteurs. Nous avons opté pour un itinéraire en ligne droite qui traverserait des aires d’exposition, ce qui nous a obligés à déterminer les artefacts à retirer pour fournir cet accès direct. Nous avons généralement procédé au démantèlement de la salle en commençant par la fin de l’exposition, en allant du monte-charge vers l’extrémité opposée de la salle. Une fois les artefacts complètement retirés des espaces traversés, notre équipe a pu démonter les structures d’exposition afin d’ouvrir la voie en vue du déplacement de la camionnette. Cette étape avait aussi l’avantage d’offrir un trajet plus direct et efficace vers la salle pour le personnel y travaillant.

Ce plan d’étage montre le trajet modifié que nous avons planifié pour faciliter le déplacement de gros artefacts présentés dans la salle du Canada.

Ce plan d’étage montre le trajet modifié que nous avons planifié pour faciliter le déplacement de gros artefacts présentés dans la salle du Canada.

La camionnette Dodge se trouvait derrière la gare et le silo à céréales, à peu près à mi-chemin, dans la salle du Canada. Elle était garée tout près du silo à céréales, mais là ne résidait pas la vraie difficulté. Le sol inégal et les coins rapprochés qui entraînaient des virages serrés soulevaient toutefois tout un problème. La configuration du sol compliquait nos efforts pour pousser la camionnette au moyen de nos petits chariots à roulettes, mais, pour utiliser nos plus gros chariots et les positionner sous les essieux, il nous aurait fallu élever bien davantage la camionnette. Il aurait été ainsi plus facile de pousser le véhicule, mais nous voulions éviter de déplacer un objet lourd avec un centre de gravité très élevé sur une surface inégale.

Photographie de la plaque tournante construite pour retirer le Dodge Fargo de la salle du Canada.

Photographie de la plaque tournante construite pour retirer le Dodge Fargo de la salle du Canada. Musée canadien de l’histoire, photo: Steven Darby.

Heureusement, il y avait une solution de rechange. Nous disposons d’un chariot élévateur motorisé pour palettes capable de soulever et de déplacer des charges pesant jusqu’à 2 200 kg. Cette solution offrait une capacité de levée suffisante ainsi qu’une force motrice contrôlable, mais le dispositif de levage lui-même n’avait pas la souplesse nécessaire pour négocier les virages serrés. Il fallait faire en sorte que le chariot élévateur puisse pivoter tout en soulevant et en tirant le Dodge. Après réflexion, j’ai conclu que la solution résiderait dans la construction d’une plaque tournante. J’en ai donc construit une à partir de matériaux et d’équipement que nous avions sous la main : trois rouleaux Hillman dans un cadre, surmontés d’un disque en contreplaqué (¾ po).

Photographie de la plaque tournante construite pour retirer le Dodge Fargo de la salle du Canada.

Photographie de la plaque tournante construite pour retirer le Dodge Fargo de la salle du Canada. Musée canadien de l’histoire, photo: Steven Darby.

Comme vous pouvez le voir sur les images ci-dessus, les rouleaux externes ont été placés vers le bas. Cela nous a permis de faire pivoter le disque en contreplaqué sur un rouleau médian dans les virages. En plaçant la plaque tournante sur le chariot élévateur pour palettes sous l’essieu avant, ainsi que l’essieu arrière sur des chariots, nous avons pu faire pivoter le tout assez librement pour parcourir les espaces que nous avions ouverts jusqu’au monte-charge. Ce système nous a aussi permis de garder les pneus avant de la camionnette aussi près du sol que possible, et de maintenir le centre de gravité aussi bas que possible, pour réduire le risque au minimum

Photographie de la camionnette Dodge Fargo sur la plaque tournante.

Photographie de la camionnette Dodge Fargo sur la plaque tournante. Musée canadien de l’histoire, photo: Steven Darby.

Alors que des employés chargés des collections et de la préparation des expositions guidaient l’arrière de la camionnette, j’ai pu mener celle-ci à travers les ouvertures jusqu’au monte-charge, puis vers l’une des salles plus vastes qu’occupent nos collections.

Des experts des collections sortent la camionnette Dodge Fargo de la salle du Canada en suivant le trajet modifié.

Des experts des collections sortent la camionnette Dodge Fargo de la salle du Canada en suivant le trajet modifié. Musée canadien de l’histoire, photo: Steven Darby.

En achevant la rédaction de ce billet, je me suis rendu compte que le canot comme la camionnette sont des artefacts liés à l’univers des transports, et que les autres sujets dont je pourrais traiter – si j’ai à nouveau la possibilité de proposer des articles à ce blogue – y toucheraient également. Les mouvements de population et le transport de marchandises ont évidemment été au cœur de l’histoire et de l’essor de notre pays.

Des experts des collections sortent la camionnette Dodge Fargo de la salle du Canada en suivant le trajet modifié.

Des experts des collections sortent la camionnette Dodge Fargo de la salle du Canada en suivant le trajet modifié. Musée canadien de l’histoire, photo: Steven Darby.

Bien sûr, tous ces efforts que nous avons déployés exigeaient la participation d’une équipe de professionnels dévoués. Ils se reconnaîtront et je ne mentionnerai donc ici que leurs prénoms, dans le désordre, pour les remercier publiquement : Erin, Tinisha, Wojtek, Dave, Joe, Jennifer, Mona et Derick.

Comme je l’ai écrit dans mon billet précédent, n’hésitez pas à me faire part de vos questions ou commentaires. Je serai ravi d’y répondre.