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Un avion blanc survolant un fond rouge au Musée canadien de l'histoire à Ottawa.

Séduire par les mots – Des valentins de l’époque victorienne

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Publié

13 févr. 2015


S’il y a une date à laquelle l’on espère tant recevoir du courrier, c’est bien le 14 février. La tradition de souligner la Saint-Valentin par des messages amoureux a des origines lointaines. L’un de ces exemples anciens est un valentin conservé à la British Library et daté de 1477. Margery Brews écrivit à son fiancé John Paston « Unto my right well-beloved Valentine John Paston, squire, be this bill delivered » [Que ce billet soit livré à John Paston, mon valentin bien-aimé et chevalier servant.]

De ce côté-ci de l’Atlantique, l’engouement pour la Saint-Valentin se fait sentir à partir des années 1860. Les papetiers s’empressent d’annoncer un grand choix de valentins dans les journaux tels que The Gazette, The Globe and Mail et The Morning Chronicle. La popularité de l’envoi de valentins est ce qui a sans doute obligé le ministère des Postes à leur accorder une mention spéciale dans la nouvelle loi de 1867, prévoyant un système postal uniforme pour l’ensemble du nouveau Dominion. « Valentines must be treated in all respects as ordinary letters, and the same care is to be taken both in their delivery and despatch. » [Les valentins doivent être traités en tout point comme du courrier ordinaire. La même attention doit être portée à leur livraison et à leur expédition.]

Les cartes de la Saint-Valentin ont joué un rôle important dans le rituel amoureux au xixe siècle. Le valentin joue le rôle d’un ambassadeur. On remplace sa présence par celle de sa plume. Les premiers valentins sont fabriqués à la main. Ces valentins sont utilisés bien avant l’arrivée du timbre-poste ou l’usage d’enveloppes. Les valentins sont écrits sur une feuille qui est par la suite repliée et scellée avec un cachet de cire. L’on inscrivait le nom et l’adresse sur la partie extérieure de la feuille. Ces cartes datant des années 1840 sont souvent composées d’un dessin à la plume ou d’une aquarelle accompagnée d’un message personnalisé.

Les cartes de la Saint-Valentin doivent témoigner du bon goût et de la sincérité du soupirant. Combien de soirées ces amoureux doivent-ils passer, assis à leur secrétaire, pour découper, presser et combiner tous les éléments décoratifs faisant partie de leur valentin? Une fois leur création réussie, ils s’installent avec plumes et encrier pour composer les sonnets ou les strophes qui allaient parler en leur nom.

 

Pour venir en aide aux amoureux en mal d’inspiration, il existe sur le marché des petits manuels sur l’art d’écrire qui contiennent des vers pouvant être retranscrits sur une feuille pour créer son propre valentin. Ces livrets s’inscrivent dans la grande tradition des manuels épistolaires et d’étiquettes. Les manuels de valentins sont populaires au cours des années 1830 et 1840, mais l’on en retrouve encore dans les dernières décennies du xixe siècle. Malgré leur piètre qualité d’impression, ils sont annoncés avec de grands qualificatifs : « elegant, fashionable, polite, original, sentimental, instructive » [élégants, de bon goût, courtois, originaux, sentimentaux et instructifs] et ainsi de suite.

 

Valentines-Verses---CMH-rare(FR)

© Musée canadien de l’histoire, Valentine Verses or Lines of Truth, Love and Virtue, Reverend Richard Cobbold, 1827, no 2007.100, IMG2015-0024-0004-Dm.

Murray-&-Co-Valentines-Adve(FR)

Publicité sur la variété de valentins disponibles sur le marché en vente chez le papetier Murray & Co. dans The Gazette, Montréal, 4 mars 1875. Source: Bibliothèque et archives Canada. Source: Bibliothèque et archives Canada / Montréal Gazette / 4 mars 1875 / AMICUS 1412639

Au cours des années 1850-1860, l’on voit apparaître des valentins à la composition beaucoup plus élaborée. Le valentin avec un poème ou verset écrit à la main disparaît graduellement pour être remplacé par la carte manufacturée. Les progrès des techniques d’impression permettent la création de valentins d’une composition somptueuse. Les cartes étaient décorées de cœurs entrelacés accompagnés de soie parfumée, de coquillages et de rubans. Les matières utilisées allaient de la dentelle de papier, au satin matelassé, et l’on employait même du velours. Certains de ces valentins étaient si fragiles en raison des matériaux utilisés qu’ils devaient être envoyés dans des boîtes pour les protéger. Les marchands proposaient un choix quasiment infini, accessible à toutes les bourses, afin de satisfaire tous les goûts et toutes les fantaisies. Les valentins très extravagants et chers étaient encore proposés, ce qui contribua à revisiter les critères qui définissent l’élégance et le bon goût.

En constatant les changements survenus dans la conception et l’utilisation des cartes de la Saint-Valentin, nous découvrons les préoccupations sociales et culturelles d’une société en pleine évolution. D’une création personnelle composée d’un message écrit sur une feuille jusqu’aux extravagantes œuvres, le valentin se prête aux goûts et aux modes du xixe siècle. Le valentin, issu d’une ancienne tradition populaire d’origine européenne, s’adapte et se réinvente pour s’inscrire dans les traditions sociales et économiques du xixe siècle.

 

 

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