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Un avion blanc survolant un fond rouge au Musée canadien de l'histoire à Ottawa.

Une note d’importance

Publié

16 aout 2018


Parmi les nombreux trésors réunis pour l’exposition Périr dans les glaces – Le mystère de l’expédition Franklin, la note trouvée à Victory Point en est assurément l’un des plus fascinants. Simple bout de papier en apparence, cette note en révèle pourtant beaucoup sur le sort qu’ont connu sir John Franklin et ses équipages.

Écrite sur une feuille standard préimprimée de l’Amirauté, la note comporte en fait deux messages manuscrits. Le premier, datant de mai 1847, confirme que Franklin était à la tête de l’expédition et que tout allait bien. Le second, ajouté en avril 1848, révèle une tout autre histoire, informant de la mort de 24 hommes, dont Franklin. Fait plus troublant encore, le message explique que les équipages ont choisi de déserter les navires de l’expédition, les HMS Erebus et Terror, après être restés piégés par les glaces pendant 19 mois.

Comme l’explique la conservatrice Karen Ryan, la note a été trouvée en 1859 au sud de Victory Point, sur la côte nord-ouest de l’île du Roi-Guillaume, là où les survivants des équipages de Franklin avaient posé pied après avoir quitté leurs navires. Il s’agit du seul document connu qui fait état des intentions de l’équipage de marcher jusqu’à la rivière Back dans un ultime effort de survie. Karen Ryan savait que ce document, d’une importance capitale, serait un apport précieux à l’exposition Périr dans les glaces.

Note trouvée à Victory Point

La note trouvée à Victory Point. © National Maritime Museum, Londres.

L’ennui, c’est que la note n’était alors jamais sortie de l’Angleterre. La conservatrice admet qu’elle ne fondait pas de grands espoirs sur la possibilité que le document soit exposé dans Périr dans les glaces. « Une leçon que j’ai apprise, dit-elle, c’est qu’on ne perd rien à demander. » Considérant que, dans le pire des cas, elle essuierait simplement un refus, elle s’est adressée au National Maritime Museum de Greenwich, à Londres, pour demander l’autorisation d’inclure le document dans l’exposition. À son grand plaisir (et à sa grande surprise), le National Maritime Museum a accepté – sous condition que la note soit très bien protégée.

« Le fait de laisser ce document majeur traverser l’Atlantique pour une exposition au Musée canadien de l’histoire a sans contredit été une importante décision », explique Amanda Gould, restauratrice de papier et de documents d’archives au Musée. Si la note a bien été emportée loin de l’Arctique en 1859, soit onze ans après avoir été laissée sur l’île du Roi-Guillaume par les survivants de l’expédition Franklin, elle a tout de même été abîmée dans la période qui a précédé son transfert, victime des cycles de gel et de dégel. Comme elle a été conservée sur place dans une boîte métallique, la note comporte des taches de rouille, fort nocives pour la cellulose du papier. « Naturellement, l’institution prêteuse s’inquiétait du sort de ce document très fragile », ajoute Amanda Gould.

Mais comment peut-on exposer sans inquiétude un papier vieux de 170 ans? « C’était tout un défi », confie la restauratrice. L’institution prêteuse a demandé que la note soit exposée dans un boîtier semblable à celui que Bibliothèque et Archives Canada et l’Institut canadien de conservation avaient produit pour présenter les deux exemplaires de la proclamation de la Loi constitutionnelle. Ce boîtier multifonctionnel avait été conçu pour protéger les documents contenant de l’encre photosensible, tant durant leur entreposage que durant leur transport. « Greenwich a demandé si le Musée pouvait produire un boîtier de ce genre pour le transport et l’exposition de la note. C’est ce que nous avons fait. »

Amanda Gould simplifie et résume ici un processus fastidieux, qui a nécessité de nombreuses consultations entre les deux musées. Après un long travail de réflexion sur les exigences, le Musée de l’histoire a embauché la firme Zone Display Cases pour concevoir et fabriquer la vitrine d’exposition.

Outre le caractère hermétique de la vitrine, la vitre SmartGlassMC est certainement l’une des premières particularités que remarquent les visiteurs. Conçue pour réduire au minimum l’exposition de la note à la lumière, la vitre est opaque lorsque personne ne regarde le document. Mais, lorsque quelqu’un appuie sur le bouton de la vitrine, un courant électrique se rend à la vitre qui passe ainsi d’opaque à transparente. À l’instar d’un tableau protégé par un rideau, la note peut ainsi être dévoilée grâce à un simple bouton, dans une version haute technologie de lever du rideau, explique la restauratrice.

Le Musée prend toujours grand soin de ses artefacts, mais, devant un morceau de papier de 170 ans aussi précieux – la clé du mystère Franklin – qui lui a été prêté, aucun effort n’a été ménagé pour prendre les précautions supplémentaires qui s’imposaient. « Côté méthodes et matériaux, nous avons vraiment misé sur ce qui se fait de mieux pour pouvoir exposer ce document », affirme Amanda Gould.

Cette simple note de papier a été essentielle à la résolution du mystère de l’expédition Franklin. Aujourd’hui, grâce au personnel du Musée qui a su gagner la confiance du National Maritime Museum, elle constitue un élément incontournable dans la présentation sans précédent de cette histoire.

L’exposition Périr dans les glaces – Le mystère de l’expédition Franklin est présentée au Musée canadien de l’histoire jusqu’au 30 septembre 2018.

 

[Transcription de la note trouvée à la pointe Victory]

28 mai 1847

Les HMS Erebus et Terror ont hiverné dans les glaces à 70° 5′ de latit. N., 98° 23’ de longit. O. Ayant hiverné en 1846-1847 [sic] à l’île Beechey à 74° 43′ 28″ de latit. N., 91° 39′ 15″ de longit. O.

Après avoir remonté le chenal Wellington jusqu’à 77° de latit. et être revenus par le côté ouest de l’île Cornwallis.

Sir John Franklin commande l’expédition

Tout va bien.

Un groupe constitué de 2 officiers et de 6 hommes a quitté les navires le lundi 24 mai 1847.

[signé] GM. Gore, lieut.

[signé] Chas F. Des Vœux, second-maître

25 avril 1848

Les HMS Terror et Erebus ont été désertés le 22 avril, 5 lieues au N.-N.-O. d’ici, étant enclavés depuis le 12 septembre 1846.

Les officiers et les équipages, au nombre de 105 âmes, sous le commandement du capitaine F. R. M. Crozier, sont arrivés ici, à – 69° 37′ 42″ de latit., 98° 41′ de longit.

Ce papier a été trouvé par le lieutenant Irving sous le cairn qu’aurait érigé sir James Ross en 1831 – 4 miles au nord –, où feu le commandant Gore l’a déposé en mai juin 1847.

Le pilier de sir James Ross n’a cependant pas été trouvé, et le papier a été transféré à cette position, où le pilier de sir J. Ross a été érigé.

Sir John Franklin est mort le 11 juin 1847, et le nombre total de décès dans l’expédition à ce jour s’élève à 9 officiers et à 15 hommes.

[signé] F. R. M. Crozier, capitaine et officier supérieur

Et nous partons demain, le 26, vers la rivière Back’s Fish.

[signé] James Fitzjames, capitaine, HMS Erebus

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