Les explorateurs
Jacques Marquette 1673
Jacques Marquette est né le 10 juin 1637, à Laon, dans l’ancienne province française de l’Aisne. Il a 17 ans quand il entre au noviciat des Jésuites de Nancy où il ne tarde pas à dévoiler l’orientation qu’il veut donner à son existence : « qu’il me soit commandé de partir pour les pays étrangers. C’est l’objet de mes pensées depuis ma plus tendre enfance. » Il revient à la charge en 1665, à la fin de ses études universitaires : « autrefois, écrit-il à son supérieur, je me sentais porté vers la mission des Indes ; aujourd’hui, je me rendrai très volontiers en quelque pays qu’il vous plaira de m’envoyer. » En 1666, on accorde à Jacques Marquette les missions du Canada où il arrive, le 20 septembre. Il l’ignore encore, mais il sera à l’origine de la première exploration du Mississippi par les Français.
Itinéraire
Écolier en langues amérindiennes
Le Journal des Jésuites rapporte que, le 10 octobre suivant, Marquette « monte aux Trois-Rivières pour être écolier du P. Druillettes en langue montagnaise. » En décembre, il est au Cap-de-la-Madeleine pour y apprendre l’algonquin. « Je ne trouve aucune difficulté dans les langues qui n’ont aucun rapport avec les nôtres, écrit-il le 4 août 1667, je commence aujourd’huy d’apprendre celle du pais de Manate e cet hyver j’apprendray la montagnaise. »
Le 20 mai 1668, Jacques Marquette part de Québec – qu’il ne reverra sans doute plus – pour se rendre au Sault Sainte-Marie où il va épauler le jésuite Claude Dablon qui s’y consacre à l’évangélisation des Outaouais.
Rejoindre les nouveaux peuples
La plupart des autochtones qui transitent entre les lacs Huron et Supérieur s’arrêtent au Sault Sainte-Marie. Ce sont eux qui, depuis les voyages d’Étienne Brûlé, ont révélé la proximité de la mer du Nord (baie d’Hudson). Ce sont eux qui fournissent à Jacques Marquette la description du fleuve, « Missispi », dont l’existence est depuis longtemps connue des missionnaires.
Au cours de l’automne 1669, Jacques Marquette se rend à l’extrémité ouest du lac Supérieur où il fonde « la mission de la pointe du Saint-Esprit ». Outaouais et Hurons adoptent l’établissement. Ils croisent bientôt de « nouveaux peuples », dont les Illinois, qui connaissent une partie du « Missispi ». Désireux de s’y rendre dès le printemps, Marquette consacre l’hiver à l’apprentissage de la langue des Illinois. Mais il connaît les limites de ses capacités : il doit être autorisé à entreprendre ce voyage hasardeux et il doit être accompagné.
Louis Jolliet entre en scène
Aucun document ne permet d’établir avec certitude l’époque où Jacques Marquette a pu parler de son projet à Louis Jolliet. Leur rencontre a pu avoir lieu au Sault Sainte-Marie, au cours de l’été 1671. L’explorateur s’y trouvait, le 4 juin, lors de la prise de possession officielle des territoires de l’ouest par Simon Daumont de Saint-Lusson. Au même endroit, le 2 juillet suivant, Marquette prononçait ses voeux perpétuels. La suite des événements montre que les deux hommes concevaient l’exploration du Mississippi comme un projet commun.
Malheureusement, l’état de guerre entre tribus force Marquette à abandonner la mission du lac Supérieur pour retourner dans la région de Michillimakinac (Makinac). Pendant que Jolliet regagne Québec, le missionnaire choisit l’île Manitoulin (Manitoulin Island) pour, à la fin de juillet 1671, fonder la mission Saint-Ignace.
Où le Mississippi conduit-il ?
C’est Louis Jolliet qui, de toute évidence, déploie les arguments qui vont transformer le projet d’évangélisation de Jacques Marquette en expédition officielle dont le but est de découvrir où conduit le Mississippi. Quand il quitte Québec, le 5 ou le 6 octobre 1673, il a en mains une lettre autorisant le missionnaire à l’accompagner dans la recherche de la source du Mississippi. Le 8 décembre, Jolliet arrive à la mission Saint-Ignace qui, entre-temps, a été déplacée à Michillimakinac. Il transporte, écrit Marquette, « les ordres de Mr. le Comte de frontenac Nostre Gouverneur et de Mr. Talon, nostre Intendant, pour faire avec moy Cette decouverte. Je fus d’autant plus ravy de Cette bonne nouvelle, que je voiois que mes desseins alloient étre accomplis […] »
Les deux hommes partent le 17 mai avec cinq hommes et deux canots. Ils franchissent le détroit de Michillimakinac, puis ils longent la baie des Puants (Green Bay) située à l’ouest du lac Michigan. Ils y rencontrent les Maloumines ou Folles-Avoines, qui les exhortent à ne pas aller plus loin. Marquette et Jolliet poursuivent quand même leur route vers l’ouest par la rivière des Renards (Fox River). Un portage leur permet d’atteindre la rivière Meskousing (Wisconsin) qui les conduit jusqu’au fleuve Mississippi dans lequel ils entrent le 17 juin.
Continuant vers le sud, ils observent le Missouri d’abord, puis l’Ohio et, sur plus de 450 kilomètres, les terres baignées par le Mississippi. Ils sont maintenant convaincus qu’en continuant vers l’ouest ils atteindront la Californie et la mer Vermeille (océan Pacifique) et, qu’en descendant vers le sud, ils verront le golfe du Mexique. Ils n’iront pas plus loin : « Nous considérâmes de plus, écrit Marquette, que nous nous exposions à perdre le fruict de ce voyage duquel nous ne poussions pas donner aucune connoissance, si nous allions nous jeter entre les mains des Espagnols qui sans doubte nous auraient du moins retenus captifs. » Le voyage de retour débute à la mi-juillet. Le groupe quitte le village des « Akensae » en direction du Mississippi. Ils remontent vers le nord-est par la rivière Illinois jusqu’au lac Michigan et la baie des Puants.
Mort au milieu des forêts
La découverte du Mississippi a conforté Jacques Marquette dans son désir d’étendre vers l’ouest et le sud du continent l’influence missionnaire. Au mois d’octobre 1674, il quitte la baie des Puants pour aller fonder une mission chez les Illinois que Jolliet et lui sont les premiers Européens à avoir visités.
En décembre, son état de santé l’oblige à s’arrêter à la hauteur de Chicago d’où il repart le 30 mars 1675. Le 8 avril, il s’arrête dans un village où il fonde la mission de la Conception immaculée de la Sainte-Vierge. Jacques Marquette est décédé le 18 mai suivant « au milieu des forests », près de l’actuelle ville de Luddington, au Michigan. Il avait 38 ans. Un an plus tard, ses restes étaient exhumés et transportés à la mission Saint-Ignace.