La collection de Chris Bennedsen joue un autre rôle : elle n’est pas la simple preuve matérielle d’une vie bien remplie. Ces éléments rassemblés, devenus archives, sont en effet la manifestation concrète de ses souvenirs. Lettres, cahiers, photos et autres documents deviennent des sites de sa mémoire, témoignages d’abord du défi physique, mental et émotionnel que représentait pour lui la migration, ensuite de la nouvelle vie qu’il a bâtie et nourrie en terre canadienne.

Par la rédaction de lettres à ses proches, par exemple, Chris partage ses expériences et renforce simultanément ses souvenirs. Les missives qu’il reçoit incarnent aussi des souvenirs, celui d’une mère, qu’il ne reverra pas pendant des années, d’amis et de camarades de classe, qui entreprennent leur propre cheminement, et du petit village où sa vie a commencé. Ainsi ses souvenirs, son identité même, deviennent-ils étroitement et intimement liés à ses lettres et aux autres objets de sa collection.

Ces milliers d’éléments, aérogrammes et lettres, cartes postales et photos, certificats de mariage et journaux intimes, et babioles multiples, donnent une forme physique, palpable, aux souvenirs de Chris. Pour lui, il était donc capital de les accumuler et de les préserver avec soin. Il ne pouvait tout simplement pas jeter son passé à la poubelle, tout comme un musée ne saurait se défaire de ses collections.